mardi 29 mai 2007

1998 - à 17 ans - pas gay mais pas triste

Fin 1998 ou début 1999, je ne sais plus, je rencontre de plein fouet l’homosexualité (sans mauvais jeu de mots). Il faut que je raconte ici la croquante anecdote qui m’a valu une réputation équivoque quatre ans plus tard.

Je suis arrivé depuis quelques semaines à Bordeaux, à tout juste 17 ans. Je viens de quitter le giron familial, j’ai mon petit appart’ rien qu’à moi, au cœur de la grande ville. J’ai décidé en arrivant ici que j’allais en profiter un maximum pour m’ouvrir, moi le timide renfermé, pour me faire de nouveaux amis, pour faire de nouvelles expériences… Je suis peut-être allé un peu vite en besogne…

Dimanche soir, je rentre de chez mes parents et de la gare Saint-Jean avec mon gros sac. J’attends le bus place de la Victoire, le centre névralgique de Bordeaux. Soudain une petite échauffourée éclate parmi une bande de jeunes qui trainait par là. Rien de bien méchant, A côté de moi un type ne peut s’empêcher de faire je ne sais plus quelle remarque tout haut, bien fort. J’ai dû acquiescer d’un hochement de tête. Il n'en fallait pas plus pour que le type en question commence à engager la conversation. Sympa, mais voilà mon bus, allez au revoir. Mais attends, je prends le même bus! Ah bon, ben alors on peut continuer à discuter dans le bus.

Eric, il s’appelle. Il a une trentaine d’années, jeune d’esprit et dynamique. Et avant que je descende du bus, coupant court à une discussion pourtant bien engagée, le voilà qui me dit: « Zut j’aime pas arrêter une conversation en plein milieu comme ça… tiens si tu veux je te file mon téléphone, tu n’as qu’à m’appeler un peu plus tard, on va se prendre un café. » En fait c’est lui qui m’appellera le premier, à peine une demi-heure plus tard (oui je sais, je lui ai donné mon numéro alors que je le connaissais depuis 10 minutes, mais n’oubliez pas que je suis dans mon trip « je-suis-ouvert-je-rencontre-des-gens »). « Je pensais: pourquoi tu viendrais pas manger chez moi plutôt? » Trop heureux d’éviter de me préparer une délicieuse platée de nouilles-jambon, ni une ni deux j’accepte.

Une demi-heure plus tard je débarque dans l’appartement très cosy d’Eric. Un chat angora se frotte contre mes jambes. Rapide coup d’œil: Eric vit tout seul. Célibataire soigneux. L’endroit est plutôt coquet et propret, des chemises sèchent bien étendues sur le rebord de la mezzanine. Apéritif, blablabla, et on passe à table. C’était sans doute bon, aucun souvenir. Par contre je me rappelle être allé aux toilettes, et avoir remarqué les nombreuses revues sur comment élever un enfant, des revues de jeunes parents. Pourtant il a bien l’air célibataire… Bizarre…

Après le dîner, on continue à papoter sur le canapé. Et puis soudain, Eric me dit: « Tu as l’air tendu… » Et moi, un peu surpris, je bredouille quelque chose comme: « Ben euh oui, c’est possible, je suis plutôt timide de nature, c’est pour ça. » Et lui de me dire qu’il a été kiné et de me proposer un petit massage pour me détendre. Bon, pourquoi pas?

Et c’est ainsi que je me retrouve, vers 23 heures un dimanche soir, à plat ventre sur le canapé d’un type que je connais depuis à peine 4 heures, dos nu, en train de me faire faire un massage. Mais j’ai 17 ans, je suis naïf. Et quand il me propose de me retourner pour continuer le massage sur le torse, le vin du repas aidant, je ne bronche pas et me dis que c’est la suite normale du massage. En plus, il masse vraiment bien, alors je me laisse aller les yeux mi-clos. Et puis, malgré la fatigue et l’alcool, je me rends compte qu’il se concentre peu à peu sur mon abdomen, puis que ses mains descendent peu à peu. « Tu devrais enlever ta ceinture, ton jean a l’air bien serré, ça te détendrait un peu plus ». Et moi d’accuiescer sans réfléchir… Vous devinez la suite, il a pas tardé à descendre encore un peu. Quand il arrive aux poils, je commence à me demander si c’est normal pour un massage. Mais bon, je suis dans mon trip je-suis-ouvert-je-fais-de-nouvelles-expériences, alors je laisse faire.

Je suis un peu bourré et endormi, mais je me rends quand même compte assez vite qu’il s’est mis à me masturber. Et là… ben rien. Je crois bien que je laisse faire une ou deux minutes, et je finis par me relever sur les coudes: « Je suis désolé, mais là ça me fait rien. » C’est pourtant un très bon masseur. Mais à cet endroit-là, il faut plus qu’un massage pour faire de l’effet.

Je mets fin au massage, me rhabille tranquillement, continue à discuter comme si de rien n’était, et m’en vais une heure plus tard. Sans vraiment avoir bien compris ce qui vient de se passer.

Eric me rappelle le lendemain. Je ne suis pas disponible pour sortir. Il remet ça un peu plus tard dans la semaine. « Non là je peux pas, je suis avec une copine ». En réalité, j’étais avec ma copine. Il ne m’a plus jamais rappelé.

Je suis repassé plusieurs fois devant chez lui. Parfois j’ai pensé sonner. Il était sympa après tout. Et moi, avec ma naïveté, je refusais de penser qu’il avait tenté de coucher avec moi, et même qu’il puisse être homo. Toutes ces revues sur l’éducation des enfants dans les toilettes, je me disais, il peut pas être… Je me demande encore aujourd’hui ce qu’il a pensé…

Suite à cette (més)aventure, il m’arrivera souvent d’attirer les hommes (dont un immigré-homo-catholique pratiquant et astrologue, détonant mélange!). Mais pourtant j’ai rien demandé moi! J'ai beau être ouvert, c'est pas mon truc. Heureusement, je n'attire pas que les hommes...

jeudi 10 mai 2007

1999 - à 18 ans - Premières gâchées, expériences enrichissantes

1999 se termine par un magnifique pied-de-nez. Le coupable: Dame Nature. Le réveillon de Noel, « gâché » par la tempête de décembre, aura pourtant été le plus chouette que j’ai connu: aux chandelles, dans la distillerie de mon grand-père où l’alambic nous réchauffait, alors que l’électricité partout ou presque fait défaut. Forcément, les plans pour le 31 décembre ont changé un peu en catastrophe. Je me retrouve avec une amie et des gens que je ne connais pas, dans une grande maison au toit à moitié effondré suite à la tempête, où il faut se réchauffer, s’éclairer… et ce sera un grand réveillon, intime, différent, insolite. Et puis ça me fait bien rire, quand je pense à tous les préparatifs fastueux qu’on a fait pour le passage à l’an 2000. J’ai toujours trouvé ça ridicule, tout ce tintouin autour de l’an 2000, du troisième millénaire. Ce n’est qu’une date, que des chiffres, n’en déplaise à Paco Rabanne et ses prédictions foireuses (plutôt discret depuis, le garçon!). Et puis c’est pas l’an 2000 pour tout le monde.


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Plus sérieusement, 1999 est une année de première fois. Pour le meilleur et pour le pire. 18 ans. Le permis de conduire. Premiers contacts avec le milieu professionnel. Premier amours véritables…

Elle est douce, belle, élancée, souriante, intelligente… trop bien pour moi, et pourtant on s’aime. Et moi, avec mes sautes d’humeur dépressives de l’époque, je finis par tout gâcher. Encore aujourd’hui je le regrette. Elle me quitte alors que j’effectue un stage dans une entreprise où l’on m’a confié des vérifications de chiffres et de statistiques. Passionnant. Et bien des fois, je pleurerai en silence derrière mon écran d’ordinateur, en tapant dans le vide sur mon clavier pour ne pas attirer l’attention.


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Je vis depuis octobre 1998 à Bordeaux, seul dans un petit appartement sombre. Je suis venu ici pour étudier dans une école de commerce privée, et me suis rendu compte au bout de quelques mois que ça ne me plaisait pas, que je n’étais pas fait pour ça. Alors j’ai cessé d’aller en cours. Sans rien dire à ma mère. Je culpabilise de sécher alors qu’elle fait de gros efforts financiers pour me payer cette école.

La seule chose qui m’ait fait rester dans ce fichu institut, c’est le club théâtre. En six mois à peine, nous avons monté une pièce, ou plus exactement un ensemble de sketches d’André Dubillard, orfèvre méconnu du théâtre humoristique, du non-sens, de l’absurde. La fin de l’année universitaire approche, je ne viens plus aux cours, mais tous les soirs de répétition, je suis là, assidu, passionné. Nous jouons finalement dans un joli petit théâtre de Bordeaux, devant 400 personnes. Et je me souviens avoir scandalisé la salle lorsque, alors que je jouais un personnage en train de se confesser à un drôle de curé, j’ai soudain improvisé le mouvement d’une prière musulmane. J’aime provoquer. Et ça contraste tellement avec le reste de ma personnalité (je crois) que chaque fois, ça surprend.

Mais en dehors du théâtre, je sors peu, et c’est à cette époque que je commence à me morfondre dans mon appart’. Je ne répons plus au téléphone, je sais que c’est l’école ou des collègues de promo qui m’appellent pour savoir ce que je deviens. Ils s’inquiètent, viennent sonner à ma porte. Je réponds jamais. Et puis un soir, alors que le téléphone et la porte ont sonné plusieurs fois sans réponse de ma part, j’entends de grands bruits dans l’escalier, qui me tirent un peu de ma léthargie. On frappe à la porte, et fort. Je prends peur, je reste immobile et silencieux. Une voix forte, mâle, appelle : « Y’a quelqu’un ? Ouvrez sinon je défonce la porte ». Pas envie d’avoir à expliquer à ma proprio pourquoi on a défoncé la porte : j’ouvre. Devant moi, une demi-douzaine de pompiers, l’un d’eux muni d’une hache, prêts à intervenir. Lorsqu’ils comprennent qu’ils ont affaire à un post-ado mal dans peau et qu’ils se sont déplacés pour rien, je vois bien la colère dans leurs yeux. Je bredouille des excuses, ma mère alertée par l’école arrive peu après aux abois. Séance d’explications honteuses et larmoyantes de ma part : mon année universitaire et bordelaise s’achève là. En avril.


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De cette année de premières fois (qui n’est pas si malheureuse que ce que l’on pourrait penser), il y aurait plein d’autres choses à raconter, mais je n’ai pas envie de vous parler de tout ça. Plutôt d’un petit film brésilien, « Central do Brasil », dans lequel une dame d’âge mûre, bourrue et solitaire accompagne un enfant des rues de Rio à la recherche de son père, quelque part dans la pampa. Un film beau et tragique, où la pudeur et la fierté empêchent les sentiments de s’exprimer. Tragique, parce qu’à la fin le petit garçon ne retrouvera pas le père qu’il espérait, et la vieille d’âme, devenue au fil du voyage une sorte de mère adoptive, s’en retourne à la grande ville sans lui.

Je suis allé voir ce film avec ma copine de l’époque, et en sortant de la séance, j’ai dit : « j’aurais aimé vivre une histoire pareille ». Elle n’a pas compris. Pourquoi aurais-je aimé vivre ce qu’a vécu ce gamin des rues, cette histoire si triste et poignante ? Elle se met presque en colère, et moi je n’arrive pas à expliquer. Expliquer que l’intéressant dans la vie, ce sont les expériences fortes, qu’elles soient joyeuses ou dramatiques. Expliquer pourquoi je suis content d’être triste parfois, parce qu’il faut avoir été malheureux pour apprécier le vrai bonheur.

« Le malheur est un privilège », a écrit Lilylalibelle dans un précédent Ricochet. J’y souscris entièrement. C’est ce soir-là, en sortant du cinéma, que j’ai commencé à considérer tout événement nouveau comme une expérience enrichissante. Et bien je peux vous dire que lorsqu’on arrive à voir les choses comme ça, ça facilite grandement la vie! Ca permet de relativiser sur les malheurs qui nous tombent dessus, par exemple. Ce n’est pas rien.

mardi 24 avril 2007

2000 - à 19 ans - sauvé du trou noir par le journalisme

2000 est une année de transition, de dépressif inactif et solitaire à apprenti journaliste heureux de vivre. C’est le journalisme qui m’a sauvé. Au début je devais juste faire un stage d’observation dans le canard local, et puis très vite j’ai été accro. J’ai eu la chance de tomber sur une petite équipe qui était presque comme une famille. Ce sont eux, devenus amis, qui m’ont sorti de mon trou, sans même que je m’en rende compte.

Car si, avec le recul, je peux dire objectivement que j’ai fait une dépression, à l’époque, je ne m’en rendais absolument pas compte. On glisse petit à petit, et on finit par réaliser que l’on est tombé bien bas le jour où l’on touche le fond, pas avant. Et pourtant, ça crevait les yeux: pendant des mois, j’ai glandé tout seul dans mon petit appartement à Bordeaux, alors que j’étais censé aller en fac d’histoire (en réalité j’ai suivi les cours pendant deux-trois mois, pas plus). Je ne sortais que pour aller à la Fnac ou au ciné,dont j’étais devenu un boulimique (jusqu’à 20 séances en un mois!). D’ailleurs je rêvais de faire du cinéma. Quelquefois je retrouvais les autres membres d’un journal étudiant dont je faisais partie: c’était ma seule vie sociale. Je vivais par procuration, à travers ce que je voyais dans les salles obscures.

Parfois, même quand le frigo était vide, je préférais dépenser mes derniers francs dans une place de cinéma plutôt qu’aller faire le plein au supermarché. Certains jours, je ne m’alimentais que de céréales et d’eau sucrée. Pourtant je ne perdais pas de poids: je n’avais aucune activité physique. Mais j’avais une mine de déterré.

La radio était ma meilleure amie, ainsi que mon jeu de carte: je faisais des patientes pendant des heures en écoutant Rires et Chansons. J’alignais des statistiques imaginaires sur des joueurs de tennis ou des équipes de basket tout autant imaginaires. Je compensais ma misère sentimentale et sexuelle en triste séances de masturbation, après lesquelles je me sentais toujours mal. Pas coupable (je n’ai jamais considéré que se tripoter, c’est pas bien), mais seul. Pathétique. Avec une existence aussi misérable, pas étonnant que j’avais envie de m’évader vers le monde merveilleux du grand écran.

Et pourtant j’avais une (je ne trouve pas d’adjectif pour la qualifier) envie de vivre! Une envie qui étouffait, et ressortait par bouffées dès qu’elle en avait l’occasion, comme lors de ce fou week-end à Rennes avec le journal étudiant. Envie de faire entendre ma voix, aussi (c’est pour cela que je rêvais de faire du ciné, ou alors de la politique), même si c’est pour raconter des bêtises. C’est cette année-là que j’ai vraiment commencé à éprouver le besoin d’écrire. D’où le journalisme, que je n’ai jamais délaissé depuis.

C’est aussi cette année-là que je suis allé pour la première fois rendre visite à mon artiste de père, échoué depuis plusieurs mois dans un village perdu dans les monts du Beaujolais. Pour moi, ce fut, comme ce le sera désormais à chaque fois, une cure de nature et de méditation. Pour les autochtones, il restera un incompréhensible farfelu, dont les idées bizarres font peur. Mon père n’est pas dangereux, mais il remet en question beaucoup de choses sur le plan mystique notamment, et il est aussi difficile à suivre que Nietzsche pour un enfant de 10 ans. Il n’est pas comme tout le monde, et ça dérange. Moi-même j’ai souvent du mal à le comprendre, ou à accepter ses idées. Il en a toujours été ainsi. Mais je me dis que d’une certaine manière, j’ai de la chance d’avoir un papa pas comme les autres.

jeudi 12 avril 2007

2001 - à 20 ans - Noël noir, 11-Septembre indifférent

J’ai passé en 2001 le meilleur de mes Noël. Le 24 décembre, convocation dans le bureau de Grand chef, accompagné du rédac’chef. Chouette, ils vont m’annoncer officiellement que je vais être titularisé, après m’en avoir chacun parlé à plusieurs reprises. En CDI à 20 ans, en plus dans ce métier qui me plaît tant! Waouh! Ce soir on va ouvrir le champagne!

Je ne sais plus très bien ce que l’on s’est raconté lors de cet entretien officiel. Mais le soir du 24, je n’ai pas ouvert le champagne. Le 25 encore moins. J’étais sonné. Alors que depuis trois semaines, le CDI à partir du 1er janvier semblait acquis (c’est Grand chef lui-même qui me l’avait dit), la direction a finalement changé d’opinion la veille de Noël. Merci du cadeau!

Mon contrat court jusqu’au 31 décembre. Autant dire que la dernière semaine, je ne suis pas été très productif. C’est marrant, personne ne m’en veut! Je fait même n’importe quoi: un week-end, j’emprunte en douce pendant deux jours, à des fins personnels, l’une des voitures officielles de l’entreprise. Quand je reviens le lundi matin, «l’affaire» est dans la bouche de tous mes collègues. Une voiture a disparu semble-t-il le vendredi soir, la direction a appelé la police qui n’a pu que constater, et le lundi matin très tôt, quand les premiers employés sont arrivés, l’auto était miraculeusement de retour! (Evidemment, ç’aurait pas été prudent de ma part de me pointer au volant de la voiture à 9 heures du matin).

Suite à ce magnifique Noel, je fais une petite déprime d’un bon mois et demi, avant que le journal me rappelle: ils ont besoin de moi. Rien que par fierté, j’ai failli dire non. Et puis… j’y vais. Ma meilleure revanche serait de montrer à ceux qui n’avaient pas voulu de moi qu’ils se sont trompés à mon sujet.

C’est à ce moment, les tous dernier jours de 2001, que je commence à songer à une reprise d’études. Un long cheminement dans ma tête qui finira par me conduire à l’IUT de journalisme de Tours, près de deux ans plus tard. Un long cheminement, parce que les études que j’avais plus ou moins suivies avant ne me plaisaient pas et que je ne voyais pas ce que l’université pourrait m’apporter; parce que j’avais commencé à travailler avec un vrai salaire dans la branche que je voulais, et que je m’étais dit bêtement: tu vas leur prouver qu’aujourd’hui encore on peut très bien s’en sortir en ayant juste le bac.

Ben tiens! Prétentieux, va! Et puis, prouver à qui? Ta famille? Non, c’est pas le but. A tes vieux profs qui pensaient que tu étais trop glandeur et que tu n’arriverais à rien? A tes collègues de lycée qui voulaient faire des bac+5 et des grandes écoles et tout le tralala? Oui, c’est un peu de tout ça, j’avoue. Comme une envie de vengeance. Mais me venger de quoi? Je ne sais pas… de ne pas avoir eu véritablement d’amis ni de vie sociale quand j’étais au lycée, peut-être… J’en reparlerai…


***

Ca ne me plait pas beaucoup, mais il faut que je raconte ici «mon» 11 septembre 2001. Il se trouve que j’ai allumé la télé cet après-midi-là. Je me rappelle très bien, je voulais regarder je ne sais plus quoi, et au lieu de ce je-ne-sais-plus-quoi, j’ai vu un plan fixe de l’un des deux tours en train de flamber. «Zut, c’est quoi ce navet hollywoodien? ils ont changé la programmation». Soudain, la voix métallique de David Pujadas. Et là je me dis: tiens? ce serait un film français? (ben oui, ça arrive dans les films que l’on entende les vrais présentateurs de JT donner des fausses nouvelles). Curieux tout de même. Et puis en un éclair je comprends.

Eh bien ça m’a fait ni chaud ni froid! A mes yeux habitués aux images d’explosions, de violence, de films catastrophes, la vision des Twin Towers en flammes, percutées par deux avions, n’a rien d’extraordinaire. Même les gens sautant du 60e étage pour essayer désespérément de se sauver, petits corps ballotés par la vitesse de la chute, ne provoquent pas chez moi d’émotion particulière. Et pourtant, autour de moi, je vois des gens choqués, bouleversés par la nouvelle.

Sur le moment, je ne réalise pas la portée de l’événement. En fait j’ai autre chose à penser: j’attends avec impatience le coup de téléphone de mon rédacteur en chef, qui doit me confirmer mon affectation à un autre service pour octobre. D’une certaine façon, je vais monter en grade après mes trois premiers mois de CDD. A force d’impatience je finis par l’appeler pour lui demander confirmation, cet après-midi même. La chose à ne pas faire, évidemment. Avec les attentats, il doit être un peu occupé. Du coup, mon appel doit lui paraître bien futile et égocentré: «Tu as vu ce qui se passe à New York?» lance-t-il avec un ton un peu rude. Et moi je lui sors une réponse idiote du genre «oui j’ai vu ça, dis donc!» et puis rien de plus. Ca commence bien! Heureusement il n’a pas trop de temps à perdre, donc il ne relève pas la vacuité manifeste de ma réponse.

Insensible, moi? Non. Ce n’est qu’un peu plus tard ce jour-là, que je réaliserai combien, face à l’abondance de scène violentes que l’on peut voir chaque jour à la télé (ou dans les jeux vidéos), l’esprit humain devient peu à peu incapable de discernement. Pour moi, les images terribles que je voyais n’étaient pas plus (ni moins) réelles que celles d’un film catastrophe. Il a fallu que je reprenne mes esprits pour que je me rende vraiment compte de ce qui était en train de se passer réeellement. C’est plus cette prise de conscience qui m’a fait un choc que l’événement en lui-même. Dans notre société d’hyper-communication, les mots, les images, la musique perdent de leur sens, de leur force. La surabondance d’informations dilue notre capacité de réaction, notre sens critique. Alors depuis ce jour-là, le 11 septembre 2001, je regarde la télé autrement. Avec plus de distance. Ou je ne la regarde pas.

Mais pour moi, et je l’affirme aujourd’hui, le 11-Septembre n’est pas plus grave et choquant que les massacres au Kosovo ou la guerre en Irak ou le génocide rwandais. Les Etats-Unis ont récolté la tempête du vent de mort et de peur qu’ils avaient semé. Evidemment, la mort dans de telles conditions de milliers de personnes innocentes est toujours tragique. Mais dans mon for intérieur, je suis persuadé que si le même événement était survenu dans n’importe quel autre pays du monde, on n’en aurait pas parlé autant. Plus la cible paraît puissante et intouchable, plus l’on parle de sa chute. Et plus les cailloux sont grands, plus l’onde du choc des ricochets se répand…

jeudi 5 avril 2007

2002 – à 21 ans – comment j'ai porté une contrebasse dans une fontaine à 5 heures du mat’

Cognac, une chaude nuit de juillet. Le festival Blues Passions touche à sa fin. Les concerts sont depuis longtemps terminés, les bœufs dans les bars ont fait les affaires des patrons, mais là il est près de 5 heures du matin il faut fermer m’sieur-dames, Nico aide-moi à sortir le gros qui s’est endormi devant sa bière s’teu-plaît! Oui m’sieur l’agent on ferme, on ferme! Eh là-dedans, arrêtez de jouer où je vais me prendre une amende!

Il est près de 5 heures, et les musiciens ne veulent pas partir. Ils veulent prolonger la fête.

Il est 5 heures, il faut bien quitter le bar… mais on ne va pas se quitter comme ça.

Il est 5 heures, une grappe de bluesmen bien imbibés décide de s’installer place François-1er, le cœur de la ville, et de continuer le bœuf.

Il est 5 heures et quelques grammes, il fait encore très chaud, les saisonniers et les bénévoles du festival qui ont travaillé dur décompressent et vont se chamailler dans la fontaine au milieu de la place.

Il est 5 heures et quelques grammes, tout le monde est bien imbibé, et les bluesmen décident de rejoindre les saisonniers et les bénévoles, et d’aller jouer les pieds dans l’eau.

Il est 5 heures et quelques grammes, et les musiciens, aidés d’un groupe d’aficionados indécrottables, transportent leurs instruments du bar vers le centre de la place. Et voilà comment je me suis retrouvé à porter une contrebasse dans une fontaine à 5 heures du mat’, en cette chaude nuit de fin juillet 2002, à Cognac.

Il est 6 heures à peu près, le soleil se lève, les musiciens finissent par rentrer à l’hôtel en continuant à jouer et à chanter. Les instruments sont désaccordés, les voix sont cassés, mais le soleil est dans les cœurs.

Il est un peu plus de 6 heures du matin, et plutôt que de rentrer directement me coucher et mettre fin à cette nuit inoubliable, je passe au journal pour faire… je ne sais plus quoi. Je mets la clé dans la serrure, zut ça tourne pas. Je dois être fin bourré. Je ressaie, toujours pas. Je m’escrime, je gigote, et soudain j’aperçois une ombre à l’intérieur, qui s’efface rapidement. Putain, des voleurs! Le temps de reconnecter mes trois neurones dégrisés, de réfléchir à ce que j’allais faire et avoir une idée lumineuse: la police, je vois qu’on allume à l’intérieur. Un visage d’homme qui s’approche de la porte vitrée, hostile: «qu’est-ce que vous voulez?» Ben euh… je travaille là… et vous qu’est-ce que vous faites là? Le visage disparaît sans donner de réponse. J’ai pas l’esprit assez clair pour penser qu’un voleur n’aurait certainement pas agi comme ça, et je commence sérieusement à m’inquiéter et m’énerver. «Ouvrez», que je crie. Lumière, une petite silhouette apparaît et ouvre la porte: la femme de ménage, qui vient lustrer l’agence avec toute la petite famille un dimanche matin à 6 heures! Alors là je tombe des nues. Et elle, avec son charmant accent portugais: «Oh, vous venez travailler tôt aujourd’hui!» Euh… c’est cela oui!

lundi 26 mars 2007

2003 - à 22 ans - à l'école de la vie

2003. Tours, l’IUT de journalisme. Au début, c’était plus fort que moi, je ne pouvais pas m’empêcher de me sentir un peu supérieur aux autres étudiants, avec mes deux ans d’expérience professionnelle. Ca m’a joué des tours, et j’ai dégonflé le melon assez vite. J’ai même viré à 180°, hop là tout d’un coup, et j’ai commencé à rire de moi-même. L’autodérision, ça vous rend plus populaire… et parfois aussi plus ridicule. Je suis tombé dans l’excès inverse, ça m’a joué des tours là aussi. Raconte un jour une anecdote croustillante à ton sujet, et quelques mois plus tard ça te reviendra dans la figure modifié-amplifié-exagéré-transformé. Et là, quand ça t’arrive, tu comprends pas, tu tombes des nues. Et puis c’est tellement gros comme ton histoire a été métamorphosée que tu finis par en rire. Tu te dis que le téléphone arabe, vraiment, c’est pas un très bon moyen de communication.

Bref, l’IUT, ça a surtout été l’école de la vie pour moi. Parce que les cours… dans le contenu, c’était aussi inégal que 2 et 2 font 5. J’aurais bien envie de vous faire une galerie de mini-portraits des profs, mais je ne voudrais pas être attaqué pour diffamation. Je retiendrai surtout les douces folies de la vie étudiante, la vie en quasi-communauté, dans notre joyeuse bulle. On partageait tout ensemble, ou presque: les cours, les révisions, les sorties, les bouffes, les galères, les histoires de cœur et de fesses… Je ne le savais pas encore, mais ça allait me faire bizarre quand j’allais sortir de cette bulle, qui s’éclate tout d’un coup à la fin des études. Sensation de manque, de solitude, d’être orphelin parfois… Jusqu’à la bulle suivante, plus petite, plus sage… différente en tous cas.

Avant l'IUT, il y a eu la fille. La fille qui m’a fait reprendre confiance en moi, en matière de sexualité notamment. Mais comme cela déclenche beaucoup de choses, ça m’a aidé en général. Oh ça n’a pas duré longtemps, juste suffisamment pour me faire sentir bien. Merci à toi, si tu me lis.

Arrivé ici, je m’interroge. J’ai choisi le chemin descendant, donc j’ai commencé à 2006 pour terminer en 1981 (ou peut-être avant, qui sait…) Du coup, il me semble un peu étrange et illogique de raconter une année depuis le début jusqu’à la fin; mais il est difficile de raconter une année à rebours, de fin décembre à début janvier, 12 mois avant. Intéressant exercice littéraire que miss Kozlika nous offre là…

Continuons à rebours donc. Avant l’IUT, en huit mois, j’ai bourlingué. Sur cette courte période, j’ai travaillé à Angoulême, Mont-de-Marsan, Jonzac, Royan, Langon, Saintes, Condom, Auch et Blaye. Ouf! J’ai découvert les charmes de l’estuaire de la Gironde, des fins-fonds de la forêt landaise, l’ennui d’une cité balnéaire en pleine hibernation, le calme et les douceurs de la vie gersoise... J’ai appris des choses étonnantes, entendu des choses surprenantes aussi. Comme ces pauvres paysans dont le troupeau de moutons avait été ravagé par une meute de chiens errants, que j’étais venu interviewer, et qui m’ont demandé combien ils me devaient à la fin de l’entretien!

Par trois fois, à Langon, Condom et Blaye, j’ai débarqué dans des endroits que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam ni d’Abraham, et où il fallait tout de suite se débrouiller tout seul, apprendre illico à se repérer dans la ville, à savoir qui sont les gens importants, les sujets-phares... En plus, je suis arrivé à Condom après que l’agence ait subi un léger incendie, et à Blaye, le lendemain d’un dégât des eaux. Démerde-toi avec ça Coco!

Oui, pour les gens qui n’ont jamais touché au journalisme, tout ça peut ne pas paraître sérieux, et sembler mauvais pour la crédibilité du journal. Mais en fait, je me suis rendu compte que bien des fois, les p’tits jeunes qui débarquent ainsi se débrouillent tout aussi bien que les journalistes titulaires, écrasés par la routine. Les p’tits jeunes comme moi, ils ont l’envie, la curiosité, ils ont un œil neuf…

J’ai ainsi parcouru tout le Sud-Ouest dans ma p’tite voiture. Knut elle s’appelle ma voiture, depuis qu’une Allemande l’a baptisée ainsi. C’est mignon non? Combien de fois, durant des périples hasardeux dans des coins désolés, j’ai craint la panne sèche, et combien de fois tes ressources m’ont étonné, petite Knut! Combien de kilomètres as-tu pu faire presque à jeun, assoiffée de carburant? Tu me connaissais, tu en gardais toujours un peu en réserve, au cas où.

Désormais doté d’une conscience écologiste, je limite au maximum les déplacements en voiture, et Knut est au garage en France tandis que je suis au Chili, mais je la remercie pour son aide et sa fidélité.

Hein? Comment? J’entends pas… Ah oui d’accord! Knut, on me transmet que le garagiste te remercie pour lui avoir été aussi fidèle. C’est vrai que tu vieillissais et qu’il fallait régulièrement t’emmener à l’hôpital des autos. Maintenant, tu es en garage de retraite.

Quant à moi je ne sais pas comment finir ce Ricochet de 2003 qui a déjà beaucoup rebondi et traîne en longueur. Je n’ai pas de chute: on dirait qu’il ne veut pas faire plouf, il a déjà traversé toute l’eau sans doute. Alors à défaut de plouf, (et là attention il y a un message subliminal quasi-incompréhensible même pour la personne concernée), je vais terminer par ricocher sur les cailloux par un beau SHPLOK!

jeudi 15 mars 2007

2004 - à 23 ans - quand je me prenais pour Laurent Ruquier

Je suis entré à Radio Campus par la petite porte. L’antenne de Tours venait de naître, un bébé des étudiants en journalisme. Ca tombe bien, j’en faisais partie. C’est curieux, j’étais venu à l’IUT pour apprendre la radio, ce projet me plaisait, mais j’hésitais à m’y impliquer. J’étais comme un chat craintif de se faire échauder. A vrai dire, le direct, les horaires à respecter à la seconde prêt, la complexité du matériel technique, tout ça me faisait un peu peur. Et puis aussi, devoir se lever de temps en temps à 5 heures et demie du mat’ pour assurer la «tranche info» du matin. Ca oui alors, j’ai rechigné!

Et puis j’ai franchi le pas. Et j’ai adoré ça. Au bout de quelques semaines, je faisais partie des piliers de la radio. A la rentrée universitaire (septembre 2004), j’étais devenu trésorier, directeur des programmes, je coprésentais une émission et participais à deux autres. Je dis pas ça pour me vanter, c’est la stricte vérité. En fait, c’était trop. Voire beaucoup trop. J’ai commencé à sauter les cours. Ma vie tournait autour de la radio. J’en ai même (un peu) délaissé ma copine de l’époque et les sorties entre potes. J’étais accro. Même pendant les vacances, lors de mon stage à Beauvais ville fleurie, sa cathédrale au toit écroulé et son usine Spontex qui pue, je pensais Radio Campus.

Pourquoi cet envoûtement radiophonique, cette attraction pour le micro? Pour plein de raisons. Ce pouvoir enfantin de pouvoir lancer un jingle quand on veut, de faire découvrir une musique. Etre une voix qui rit ou chuchote à l’oreille de l’auditeur (peu importe s’ils n’étaient qu’une poignée à nous écouter), qui lui parle directement, comme s’il était juste à côté. Se retrouver entre copains autour d’un café et d’un micro, faire des émissions entre amis. Et puis surtout, enfin, parler librement de ce qui nous tient à cœur, sans être contraint par une ligne éditoriale, un format strict, ou un chef de rubrique asphyxiant.

J’adorais faire des chroniques piquantes, avec un peu d’humour. Je me rêvais Laurent Ruquier, je faisais vraiment ce qui me plaisait. J’ai même pensé lui envoyer une démo à Europe 1 - et puis je l’ai pas fait. Je sais, tout ça est un peu préntentieux, mais ça m’a permis de prendre de l’assurance. J’ai grandi, je me suis responsabilisé, épanoui… Et puis c’était une chouette expérience de groupe. On a vécu des galères, on a passé des semaines entières sur les rotules, mais ça valait la peine.

Et puis début 2005, je suis parti de l’IUT pour Dortmund et la radio s’est brutalement arrêtée pour moi. Jingle. Générique de fin. Silence radio.

jeudi 22 février 2007

2005 - à 24 ans - Insouciance

2005. Une grande année. Belle, enrichissante, inoubliable. Une année Erasmus. Je suis parti en Allemagne célibataire, et je dois bien avouer que je pensais me trouver « une petite Tchèque » là-bas. Ce que je peux être con des fois! J’y ai trouvé une Chilienne adorable, qui allait changer le cours de vie.

L’idée était, évidemment, de progresser en allemand, et aussi, évidemment, de faire la fête, rencontrer des gens, visiter... De ce côté-là j’ai été servi. Par contre, pour la langue… je me suis retrouvé en colocation avec un Belge francophone, un Rwandais francophone (dont l’histoire vaut la peine d’être contée, mais pas ici) et un Bulgare. Vous allez me dire, « ah, au moins avec lui, il pouvait parler allemand ». Ben non. Le Bulgare était rien-du-tout-phone. En cinq mois de coexistence, je n’ai pas pu tirer de lui autre chose qu’un « hallôô » forcé, comme s’il parlait avec un yaourt entier (bulgare, évidemment) dans la bouche. Asocial le garçon. En plus, la majorité des étudiants Erasmus étaient anglophones ou francophones. Bon, au moins, j’ai progressé en anglais. De toutes façons, l’allemand, j’en ai oublié la moitié depuis que je suis au Chili et que je parle espagnol tous les jours.

Erasmus, c’est l’insouciance, une paranthèse enchantée. Un semestre sans avoir de comptes à rendre à personne, la liberté quoi. Erasmus, c’est faire des choses qu’on aurait pas pu ni osé faire chez soi, la faute aux contraintes sociales. Et puis si on se fait réprimander, « euh, je suis pas allemand, je savais pas… » J’ai lu quelque part qu’Erasmus avait été créé dans le but de rapprocher les futures élites européennes. Si on entendait par « rapprocher » faire la nouba et boire de la bière, c’est très réussi! Vivant comme en communauté en pays étranger, on avait la sensation d’être en vacances prolongées en Allemagne, pas vraiment d’y vivre.

Et pourtant! Dortmund, Ruhrgebiet, Nord-Rhein Westfallen, Deutschland. L’endroit ne fait pas rêver, à part peut-être les amateurs de foot. Par rapport à mes collègues qui allaient en Angleterre ou en Andalousie, Dortmund, ça faisait même un peu looser. Dortmund, peut-être, mais Nuremberg l'historique, la vallée du Rhin, Berlin la fascinante, le luxueux palais de Sans-Souci à Potsdam, Bruxelles la cosmopolite, Bruges la belle carte postale, Amsterdam l’enchanteresse…? Tous ces lieux je les ai visités, ils m’ont donné le goût du voyage. Ca c'est inestimable.

Et puis après ces mois festifs, plouf! petit caillou, plongée directe et sans transition dans le monde du travail. Heureusement, ricochet, je connaissais déjà. C’est là qu’a commencé cette période d’accordéon entre la France et le Chili, qui a duré jusqu’à septembre 2006. Mais ça, j’en ai parlé la semaine dernière…

jeudi 15 février 2007

2006 - à 25 ans - les fesses entre deux continents

2006 se termine comme elle a commencé: à Valparaiso, un verre de champagne à la main, pour le feu d’artifice du Nouvel An. Elle se termine comme elle a commencé, tout au moins en apparence. Ce qui n’était que pétillement, joie et découverte le 1er janvier 2006 s’est un peu terni 364 jours plus tard. Entre les deux, une année partagée entre France et Chili, entre Bordeaux et Quilpué. Une année à travailler dur jusqu’à avoir suffisamment d’argent pour acheter un billet d’avion et rejoindre ma belle au Chili. Trois fois j'ai fait l'aller-retour à Santiago avant de me décider et quitter la France pour de bon, en septembre.

Jusque-là, ç'avait été une année à vivre déchiré, à me ruiner la santé à passer des heures avec elle sur Skype jusqu’au petit matin, avant d’aller travailler. Une année à faire l’élastique entre la France et le Chili, à 12.000 kilomètres l’un de l’autre. Usant. Une année à vivre ainsi, pour finalement se retrouver à Quilpué, "ciudad del Sol", enfin, et… que ça ne se passe tout à fait aussi bien que prévu. Ironie de la vie…

Mais j'ai beaucoup appris. J’ai appris l’espagnol, partant de zéro. Et plus j’apprenais l’espagnol, plus j’oubliais l’allemand. Je crois qu’il n’y a pas de place pour quatre idiomes dans ma petite tête… Une année pour apprendre à vivre à l’étranger, apprendre à vivre avec quelqu’un, avec sa famille, apprendre à vivre autrement. On apprend toujours quelque chose.

Ah , et puis il y a mes premiers pas dans la blogosphère. J’ai l’impression que c’est un monde de possibles qui s’ouvre à moi. Le virtuel, c’est la fenêtre ouverte à tous les possibles, à tous les matériellement irréalisables, les concrètement inconcevables. Et ça me plaît.