dimanche 18 février 2007

1990: O2 Ma frangine, mon miroir

1990.

L'âge des tout premiers souvenirs. Pour une fois, c'est moi qui raconte.

Je ressors des bouts de moments, vieillis, un peu ternis, mâchés et remâchés, mais toujours aussi encrés dans tout mon être.

J'ai deux ans. Je suis une grande fille.

Je fais des phrases complexes, et oui m'ssieurs dames, sujet verbe complément, et je manie allégrément tout les temps.

Je parle, je chante. Et je vacile plus que je marche.

Je m'occupe bien de mon petit frère. J'ai compris que c'était moi l'aînée. Je le vois dans les yeux de mes parents.

Avec mon p'tit bout de frangin, on s'fait des câlins. Je grimpe dans son lit, on mêle nos pouces et nos cheveux, puis on se rendort sous la couette bleue de rêve.

J'ai presque deux ans. Je vais à la maternité avec papa, maman et mamie. Ma petite cousine est née.

On acheté un doudou. Je l'adore. C'est moi qui l'ai choisis.

J'ai cette image là, ce parfum d'hôpital et cette image du tout petit bébé dans un lit transparent.

Je sais mes yeux ronds comme des billes, ma tendresse pour cette minuscule cousine, mon palmier sur la tête qui s'agite gaiement.

Je l'aime déjà ce bébé.

Mathilde.

Celle qui deviendra ma fragine, ma pareille, mon cercle isocèle, ma parallèle décalée.

Je le savais déjà. Je la suppliais de grandir vite, trépignant pour que nos années se rejoingnent et que nos genoux s'écorchent sur le même vélo, pour qu'on dévale l'existence côte-à-côte, qu'on édifie des musées insolites, qu'on peinturlure nos cabanes, qu'on s'aime quoi!

1990. Nous v'là tous les quatre. Les cousins.

Nous les zozos, nous le boys band.

Deux gars, deux filles. Pour la parité, et pour faire mieux. Alex, Audrey, Clem', Mathilde.

1990. On lance le groupe.

Et ça fera un carton.

mardi 13 février 2007

1989: 01. Comme les quatre doigts de la main.

1989. J'ai tout juste un an et je suis déjà bavarde.

Je sais pas marcher. J'invente des chansons.

Le ventre de Maman s'arrondit, comme un petit ballon. Je m'en étonne. Alors on m'explique ce qu'il y a à l'intèrieur.

Un bébé. J'ouvre des grands yeux. Comment un bébé a pu rentrer là dedans? Les adultes disent des choses bizarres des fois.

Je regarde le ventre de Maman. Je regarde ma poupée. Mouais. Pas convaincue.

Je suis si petite encore, et déjà si grande. Dans les yeux de mes parents je vais être l'aînée.

C'est moi qui annonce à Mamie, puis à toute la famille, que je vais avoir un petit frère.

- Ce sera peut être une fille tu sais Audrey - Une petite soeur c'est bien aussi...

Non. J'aurais un petit frère. Je le sais bien moi. Et ce sera mieux qu'un poupée: un bébé, un vrai.

Je leur explique comment le bébé est venu là. C'est Maman qui m'a dit. J'ai un an et demi et je comprends dejà tout.

Mais je marche à peine. Tout s'équilbre, finalement.

''(voilà pourquoi aujourd'hui je suis en hypokhagne et je rate mon permis) (toujours ce décalage, ce fossé entre les neurones et la motricité)''

Alors ça y est. Maman est partie à l'hôpital. Le petit frère arrive.

Moi je suis intenable. J'hurle dans le couloir : "le bébé le bébé le bébé le bébé!!"

Je veux le voir.

-Il n'est pas encore là.

C'est pas vrai. Il est forcément là. Ca fait un siècle que maman est partie.

Finalement je m'endors. Dès que je méveille je recommence mon cinéma:

- le bébé le bébé le bébé le bébé!

Enfin la porte s'ouvre. Maman me sourit.

Elle tient dans ces bras un petit machin tout rose. Je crois que je fais la grimace. C'est moche ce truc.

Alors c'est ça un bébé?

Je suis désespérée. J'explique mon problème à Papa. Mais comment est ce que je vais pouvoir jouer avec lui moi ? Il ouvre même pas les yeux, il a pas de cheveux.

Bon. Maman est l'air contente. Papa aussi.

Tous les eux s'extasient et me font assoir à côté du truc rose. - Regarde Audrey! -C'est Clément, ton petit frère.

Alors je souris, et je colle un bisou collant sur le front minuscule de cette chose qu'ils ont l'air d'aimer.

Va pour le p'tit frère.

Nous voilà, tous ensemble. Unis comme les quatre doigts de la main. On en a pris pour sept ans et un jour.

Parce que tout le monde sait qu'il manquait un. Bah oui. Ca a cinq doigts, une main.

dimanche 11 février 2007

1988-00

-Il s'appelle comment? - C'est une fille.

23 Mars 1988. Bout de p'tite demoiselle aux cheveux bruns. Jetée dans la vie. Dans les bras de maman, surtout.

De cette année là je ne me rapelle que ces bribes de récit que j'ai bien voulu m'approprier, que ces petites anecdotes lancées pendant le dessert lors d'un repas de famille, ou près d'un lac, durant une baladant dans l'après midi brumeuse d'un dimanche d'avril.

Des petits détails, le sourire de maman quand elle en parle, les yeux flous de Papa qui ne cesse de maudire le temps qui passe, les cheveux gris sur ses temps, la ride au coin de la bouche.

Mais je vais trop vite.

En 1988, Papa est tout jeune. Rendu gamin par mon arrivée. Il court, prévient tout le monde, se gausse de ses responsabilités, s'extasie de son nouveau statut de papa.

Comme une médaille en chocolat arborée fièrement : je suis papa!

(et dedans ces trois mots là il met tout l'or du monde, tout le Colarado, toutes les Eglises, toutes les montagnes immenses)

Papa a peur d'être maladroit. Papa est fou de moi.

Papa veut être le meilleur des Papas, lui qui n'en a pas.

Il travaille la nuit. Le jour il s'occupe de moi. A quatre pattes a côté de mon transat, il s'émerveille. Il me chante des chansons, agite des peluches, me raconte des histoires de fées et déclairs auc chocolat, me presse de grandir mais pas trop vite quand même.

Je sais siffler et je souris. Je suis une star. Une vraie, qui brille, avec les reflest de cet éclat dans les pupilles de mon Papa.

Papa est vigile. Chien méchant même. Si qulequ'un respire trop fort une zone située à moins de quinze mètres de mon berceau, Papa le villipendie sévèrement.

Ce quelqu'un est immédiatement classé dans la catégorie de "coupables". Toutes ses brutes qui menacent le bonheur de son bébé chéri.

Quand il ne travaille pas la nuit, il dort pas pour autant.

Au moindre bruit, inquiet, il se précipite d'un bond auprès de mon berceau. "Elle va bien".

Lorsqu'il n'entends pas de bruit, inquiet, il accourt d'un saut auprès de mon lit. "Elle va bien"

Oui. Mes parents sont heureux. Tous les trois dans notre petite maison, on déménage pour une plus grande.

1988. L'année où on était encore que trois. L'année ou j'étais bébé chérie, merveille et émerveillement.

Avant de devenir grande fille d'un coup, comme ça.