Je vis seule à Toulouse, j'ai un petit appart à 15 mn à pied de ma classe prépa, dès le premier jour à 8 heure du mat je me ferais agressée par un type la queue à l'air qui heureusement pour moi prendra peur sous mes hurlements. Je déciderais de prendre le bus et de me priver de la balade plutôt que de retenter l'expérience.
Quand je pense que l'idée de porter plainte ne m'a pas effleuré à l'époque je me dis que les filles sont vraiment mal éduquées sur leurs droits.
Je suis donc en classe prépa sans y avoir été préparée. J'ai passé ce concours sur un coup de tête, presque pour faire plaisir à la conseillère d'orientation, et je ne sais pas ce qui m'attend. Pour tout dire je n'ai pas l'esprit de compétition, j'aime l'entraide et la camaraderie, je déchante vite. Ici même les profs nous poussent à regarder notre voisin comme un obstacle ou un escabeau pour s'élever.
J'apprendrais à me méfier de certains encouragements trop souriants et des questions pernicieuses. Je reconnais vite mes amis, il y en a 3. Le meilleur de la classe qui ne craint pas d'aider les autres et donne son avis honnêtement, une cancre qui croque la vie à pleines dents et rend la vie plus légère et puis une fille douée et décontractée qui m'a tapé dans l'oeil dès le premier jour. Je passe les premiers mois à l'attirer dans mon entourage et après une explication sur ma vie sexuelle tout à fait classique mais qui n'empêche pas des sentiments tout à fait réels, nous devenons amies pour la vie (je l'hébergerais des années plus tard à Paris et elle me recevra dans son new york mythique encore plus tard)
La vie toulousaine est faite de douceurs superficielles bien agréables, les gens sont conviviaux, ils parlent facilement dans la rue, n'hésitent pas à manifester le fait que l'on s'est déjà vu, mais l'on passe rarement le seuil de chez eux. Cette vie est séduisante lorsque l'on est étudiante.
Les cours sont trés durs pour moi, le niveau est élevé il faut fournir un travail personnel considérable. Je fais une mini dépression. Ma mère en est presque ravie, j'avais trop bien supporté l'internat là, elle retrouve son ascendant sur moi, j'appelle en pleurs, elle prend la voiture et me ramène à la maison. Comme je suis épuisée et qu'elle est en cure de sommeil la semaine peut paraitre idyllique, mais je m'ennuie et je préfère retourner au front. Les profs sont encourageants pour moi alors qu'ils s'amusent à démonter la plus fragile de mes copines.
A la fin de l'année ils me proposeront de passer ou de tenter le redoublement, je préfèrerais cacher le bulletin et dire chez moi que je n'ai pas été sélectionnée.

Pendant l'année j'ai fait quelques voyage à Périgueux pour voir mes amis, je me souviens de ma terreur de rater le train ce qui voulait dire raté mon week-end, vu les changements qu'il me fallait faire.
C'est de cette période que me vient le besoin d'être toujours en avance à la gare, je me souviens d'avoir souvent pris le train en marche c'était encore possible à l'époque.
C'est bizarre mais je garde bon souvenir de cette année, surement à cause de cette ville si agréable au premier abord. Je l'ai visité l'an passé et je me suis rendue compte que je n'en connaissais pas le quart, je n'avais pas eu le temps de m'y balader autrement que la nuit.

Avec le recul de cet exercice à l'envers ma tentative de suicide de l'année suivante était sans doute le résultat des tensions que j'ai subit cette année là.