Patrice m'avait appelée : aurais-je envie de partir un week-end avec lui visiter Bruxelles. Ma foi... oui ! Je ne connaissais pas cette ville, et j'aimais le tourisme citadin. Patrice avait été mon amant pendant six mois. Je l'avais rencontré l'été 2000. Dans ce restaurant de bord de plage qui faisait dancing passé 23h00, alors que je dansais sur la piste avec une tripotée de gamins trop heureux de quitter leurs tablées familiales, deux mains m'avaient attrapée par les épaules, je me retournais : « Vous ici ! » Patrice était le père d'une de mes élèves parisiennes, Patrice avait grandi dans cette station balnéaire à laquelle je pouvais relier tous les évènements importants de ma vie. Patrice, je l'avais revu l'été suivant, nous avions passé une nuit ensemble, j'avais cru que l'histoire s'arrêterait là, mais elle avait continué et était devenue un élément clef de mon présent d'alors. Notre rencontre avait eu lieu à un moment, où je croyais devoir renoncer à l'amour, sans pour autant me priver d'aventures. Patrice avait 50 ans, il avait été jeune adulte quand j'étais jeune enfant dans les années 70 : une autre histoire de vie, un autre contexte que le mien, une autre relation à l'amour et aux liaisons amoureuses, plein de choses à découvrir que mon tout nouveau statut de néo-célibataire me permettait. De son expérience, il m'apprit que dans toute relation, chacun ne peut recevoir qu'à la mesure de ce qu'il a misé... Il m'appris aussi qu'être amoureux était certainement la plus belle expérience terrestre. Je me laissais à tomber amoureuse. Cet état dura quelques mois. Lorsque je me posai la question d'annoncer cette liaison à mes fistons, la réponse fut claire : je n'en avais pas envie. Cette histoire n'avait été qu'une heureuse aventure, je ne lui voyais aucun avenir. L'amour se fit la malle.

Lorsqu'il m'avait appelée pour ce week-end à Bruxelles, cela faisait un mois que nous n'étions plus « ensemble ». Je croyais que les choses étaient aussi claires pour lui que pour moi : nous allions poursuivre en amis cette relation qui était nôtre. Quelle bonne idée que de faire ensemble ce que l'amour ne nous avait pas laissé le temps d'expérimenter. J'acceptais.

Au bout du quai Gare du Nord, je réalisais que je m'étais peut-être trompée sur la nature de nos nouvelles relations : il me salua en m'embrassant sur la bouche. Les choses n'étaient de toute évidence pas si claires que cela ! Il m'invitait à ce voyage, je nous voyais mal engagés pour les heures en proximité à venir si je soulevais sur le quai du départ l'écart de points de vue, je décidais de considérer ce week-end comme le sien, de lui donner une chance de rallumer en moi la flamme amoureuse, de le suivre dans ses envies.

J'ai un excellent souvenir de Bruxelles, de nos ballades bras dessus - bras dessous, de la musique des pubs jusque point d'heure. Je n'ai qu'un seul regret : que ce week-end ait été celui de la Pentecôte : le lundi se déclina sous le signe du silence. Je n'avais pas eu besoin de trois jours pour retrouver l'accord avec moi-même. Le troisième jour sembla sans fin. Je n'osais dire ce qui était évident : je n'étais définitivement plus amoureuse et recevoir ses témoignages d'amour était douloureux , je ne savais qu'en faire. Pas plus envie de le blesser que de le satisfaire. Je ne savais rien faire d'autre que me taire.

J'appris que les désirs de l'autre ne seraient jamais nécessairement les miens. Que l'état amoureux, tout magnifique qu'il soit, n'était pas définitivement pas éternel. Je réalisais que les histoires homme/femme étaient encore plus complexes lorsque les protagonistes étaient libres. J'avais expérimenté mes capacités à la séduction inconsciente... Je découvrais qu'il serait difficile de faire sans à l'avenir. Et qu'être gentille dans une relation pouvait supposer pour l'autre beaucoup plus que ce qu'on souhaitait y mettre.

J'ai beaucoup grandi à Bruxelles.