J'avais trois ans ; ça s'est passé quand j'avais trois ans, quand Pistil avait trois ans.

C'est mon premier vrai souvenir. Le plus vieux.

J'ai trois ans et le monde des adultes semble composé essentiellement de genoux. Revêtus de jeans, les genoux : foncés pour ma maman, délavés pour mon papa. Il doit y avoir d'autres nuances aussi, mais je ne sais plus. Le monde, à trois ans, c'est le soleil qui joue sur le sol et ces deux paires de genoux.

J'ai trois ans et il fait soleil et on arrive à "la maison". Ca doit faire longtemps qu'on m'en parle de "la maison", mais ça, je ne m'en rappelle pas. Je me souviens de cartons, de beaucoup de cartons dans le garage de "la maison".

Je me souviens de mon papa qui m'explique que ces cartons-là, ceux qui sont remplis de livres, sont vraiment très lourds, parce qu'il n'y a pas d'air dedans.

Voilà, dans mon premier souvenir, il y a "la maison", des livres, et la voix de mon père pour expliquer le monde.

Je continue à penser que c'est un bon départ dans la vie.