Je commence l’année à New York. J’y arpente les espaces émouvants d’Ellis Island. Malgré le froid glacial, la nuit du réveillon, nous avons brulé solennellement dans un jardin de Brooklyn un cercueil de carton et les petits papiers pliés que nous y avions enfermés, sur lesquels nous avions tous inscrit ce que nous souhaitions abandonner derrière nous et voir « mourir » à l’aube de cette nouvelle année. Je n’ai aucun souvenir de ce que j’avais écrit sur le mien.

Je me souviens d’avoir vu, dodelinante et émerveillée, Manhattan se découper dans la nuit, et que j’étais dans un état de fatigue proche de l’ivresse car mon avion s’était posé à Kennedy l’après-midi même et qu’à minuit pour moi il était six heures du matin. Je me souviens de ma surprise et de mon désappointement de petite française bonne vivante, car à aucun des deux réveillons new-yorkais auxquels on m’avait emmenée il n’y avait quoi que ce soit à manger hormis quelques cacahuètes et des chips. Et des frigidaires géants pleins de bière…

A mon retour, je retrouve N. ses bras tendres et ses attentions précieuses et drôles. L’année commence joliment.

Une déception que je n’avais encore jamais connue : le premier long métrage sur lequel j’ai vraiment travaillé de A à Z, sans relâche, de l’émergence de l’idée aux toutes dernières finitions, qui se plante. Mais alors vraiment vraiment, pas la moitié d’un échec : en deuxième semaine à Paris on n’a déjà plus qu’une salle. Et pas toutes les séances, encore… Tant de travail, tant de passion de la part de beaucoup de gens, tant de mois d’effort pour rien. Ou si peu. Et des échecs comme celui-là, c’est tellement monnaie courante dans ce métier. C’est parfois décourageant.

On me propose un autre job ailleurs. Très différent : très technique, pas du tout artistique, pas du tout créatif, mais plus sûr, mieux payé. Le cinéma, ses incertitudes permanentes, ses projets avortés, mon boss producteur caractériel (pléonasme ?), tout cela me fatigue. Je dis oui. Ce sera un enterrement professionnel de troisième classe dont je mettrai 3 ans à sortir, mais qui aura au moins le mérite de me faire bouffer et de m’apporter une sécurité inconnue depuis que je bosse.

Pendant ce temps, la relation avec N. est harmonieuse et gaie, malgré les assauts répétés de son ex-femme qui cherche désespérément à le récupérer depuis qu’elle a appris qu’il était avec moi, semblant oublier que c’est elle qui avait exigé leur séparation… Chantage à l’enfant, insultes téléphoniques ou autres… Est-ce qu’il existe des relations simples ? Des années simples ?