C'est un hiver de neige, qui ne nous a pas empêchés de traverser plusieurs fois toute la ville pour aller voir notre maison qui poussait.

J'ai un souvenir très net de palettes de parpaings, décorées de couvertures de neiges : un parpaing, une petite couverture, un parpaing, une petite couverture.

L'impression aussi que tout ce mouvement s'est fait dans la nuit : nous allions constater l'avancement des travaux après l'école, et à partir d'octobre, il fait noir.

Un souvenir très net de flocons dans la nuit.

Réserver le camion de déménagement ? Encore de nuit, les enfants restés dans la voiture écoutent le silence et regardent le blanc que les lumières du parking rendent orangé.

Ce déménagement a été celui où j'ai cru perdre le plus de choses. Des déguisements, des vieux jouets, des livres abîmés peut-être.

Je comprendrai dans trente ans que c'est un artifice qui permet aux parents de faire un peu de place dans les armoires, et je l'emploierai à mon tour. "Tel jouet ? Écoute, je ne sais pas, tu l'as peut-être perdu".

Un petit mensonge plutôt qu'une grosse crise, en attendant qu'il y ait prescription et qu'on puisse leur expliquer, pour qu'à leur tour peut-être ils "rangent" les affaires de leurs propres enfants.

D'une certaine manière, être parent c'est quelquefois être fourbe avec une petite dose de lâcheté.