Je me suis inscrite à quelques listes de discussion sur Internet. Il y a très peu de choses en français, le tour est vite fait. Ceux qui sont branchés dans le monde de l'autisme sont québécois, mais sur la toile on n'entend pas nos accents. Les quelques français de France deviennent rapidement mes amis et lors de mon passage en France durant l'été, on se rencontre, brièvement mais c'est toujours ça. Je suis contente d'assister à mon premier congrès sur l'autisme à la Défense, je me sens tellement compétente, c'est comme si j'apportais enfin quelque chose de valable, comme si ce que j'écrivais au fil des jours avait enfin du poids, servait à quelque chose et à quelqu'un.

Un jour, je trouve une de ces petites notes que me laissait souvent Estac puisqu'on se croise plus qu'on ne vit ensemble dans la grande maison. En cela, rien n'a vraiment changé. Sur la note, il me dit qu'il est temps que je rentre définitivement en France avec les enfants. Cela fait un peu plus de six mois qu'on vit tous ensemble. Il me demande quand est-ce que je sèvre le bébé. Il vient de moins en moins souvent aux rendez-vous d'évaluation, et jamais aux thérapies. Il ne met même pas un pied dans la chambre d'enfants mais projette tout de même la commercialisation d'un programme logiciel pour l'apprentissage des enfants autistes, qui ne verra jamais le jour, en tout cas pas grâce à lui. Il me reproche d'être la cause de l'arrêt définitif de sa carrière, moi, l'autisme, les enfants.

Je me réfugie dans le cliquetis de mon clavier et je regarde les arbres par la fenêtre.