(Etats des lieux de ma participation au projet, et par extension de toute mon activité bloguesque passée.)

J'ai commencé à bloguer, je ne sais plus exactement, vers 2003. J'étais un jeune post-adolescent qui s'acceptait à peine, enfin, comme homosexuel. Je sortais du lycée. En bref, je commençais de façon plutôt tonitruante une vie d'adulte (je me refuse à écrire jeune adulte. Il s'agit pour moi d'un état binaire : enfant/adulte. Point.) Jusqu'alors renfermé, plutôt solitaire, insolent avec les professeurs, mais voué au silence devant les autres enfants, je renverse immédiatement la vapeur, créant de toute pièce une carapace scénique qui n'a jamais disparu : le tatou, nom de mon premier blog. Ce fut drôle, un temps. Mais plus du tout lorsque la carapace, comme une maladie auto-immune, a tenté de détruire ce qu'elle protégeait, voulant prendre sa place.

Cette histoire, c'est celle que je ne raconte pas. C'est celle qu'on voit. Un jour blanc, un jour noir. Mon corps, au sens large, est un immense champ de bataille où s'affronte le tatou et Johann. Je crois bien que jamais personne n'a réussi à comprendre pourquoi j'ai soudain refusé que l'on m'appelle par ce pseudonyme que j'avais adopté pendant des années.

Ce que je prenais au début pour une réalité, une personnalité émergente, celle de mon moi adulte qui remontait enfin à la surface après avoir dormi plus ou moins les vingt premières années de ma vie, s'est en fait avérée une maladie mentale, au sens littéral et non pas littéraire du terme.

Au lieu de m'enfermer dedans, j'ai combattu.

Au moment du pic d'intensité de la guerre, j'avais vingt ans. J'étais entouré de nombre de gens que j'avais rencontré par l'intermédiaire des blogs, et qui avait fini par constituer la base majoritaire de ma vie : amis, amants, colocataires même.

Silence - ou est-ce un soupir ?

Cessez-le-feu. J'ai vingt-et-un ans. Peu de personnes me reconnaissent. Alors, pour dire que je suis encore le même, pour rejoindre les deux bouts, assurer une continuité dans les yeux des autres, je participe au projet de Kozlika. C'est horriblement dur. Je n'ai pour l'instant fait que trois billets, les trois premières années de ma vie. Je traîne involontairement. Je lambine, parce que bientôt, il faudra parler. Parler de ces vingts ans. Parler de l'horreur qui tourne en boucle dans ma tête. Parler de ce pourquoi j'ai vu, sans comprendre, tant de gens pleurer autour de moi. Parler de ce dont personne n'ose plus me parler. Vingt ans. 2006. Encore 17 billets.

17 billets avant de comprendre. J'ai peur.