Mon prochain ricochet est ramassé, une page manuscrite sur une feuille verte... J'aime l'écrire, le ricochet. Les vôtres que je lis régulièrement m'intéressent et réveillent l'envie, souvent, bien souvent, de ricocher, mais je dois suivre l'ordre... et l'ordre a du mal à ne pas bloquer. J'en ai réussi six, et depuis près de six mois je cherche le septième. Le caillou ramassé, il me faut le polir un peu ; et vlà que j'l'ai encore oublié là où je ne suis pas, dans la poche d'une chemise restée sur un autre dossier... bref, ça traîne. Mais je veux remonter le courant, j'ai tellement plaisir à les polir (ou pas), à rechercher un fil pour démêler l'écheveau de cette année-là, et puis quand je tire sur l'un et que tout se déroule... non, pas tout, je trouve après que ah mais oui (ou : ah mais non, c'est selon) j'aurais du parler de ci ou de ça...

L'expérience est difficile aussi du point de vue technique : pas si simple de savoir comment ordonner ces bribes de tronçons d'existence.

D'autant que je me souvienne, mes années sont scolaires, et je les ai toujours pensées ainsi, c'est telle classe, tel niveau, et l'enseignement (qui me prend tant de temps et m'empêche de ricocher, d'ailleurs ! le voilà, le coupable ;-) n'arrange pas les choses ! Alors, ce souvenir que je veux évoquer, était-ce en janvier ou en décembre ? Pour ce caillou ou pour l'année prochaine ?

Et puis il y a les années d'étudiante, qui arrivent à grands pas (tiens donc, c'est donc là que je bloque ! hum hum, très intéressant, continuez, dirait mon bon Docteur. Continuons), celles dont les albums photos dorment sous forme de pochettes de photos pas triées à ranger, en cartons qui me suivent déménagement après déménagement, et que je ne suis plus sûre de savoir mettre en ordre. N'y aurait-il pas un lien ? A l'instant où j'écris je m'aperçois de ça, je m'interroge. En fait, je me suis avouée il y a quelque temps, il y a peu de ça, peut-être quelques mois, que faire les albums de ces années-là ne m'intéressait pas, ou alors pas beaucoup, ou du moins que j'avais moins besoin qu'avant de recoller des morceaux de passé. J'en ai des albums vides et des choses à y mettre. J'ai gardé le petit papier de l'adresse d'un ami à Madrid, pour illustrer le récit du voyage. Il faudra que j'y pense. Il est là, le problème : le jour où je reprends, je risque d'oublier un des cartons et de ne pas intégrer tout ce que j'ai. Redoutable écueil. Mon grand-père disait que le perfectionnisme pouvait paralyser. Je ne savais pas encore à l'époque que j'étais perfectionniste, et je n'imaginais pas même que je puisse en souffrir.

On est très loin des Ricochets ? Pas tant que ça, je crois. Il s'agit de la difficulté de mettre en ordre mon existence, ma manie d'ordonner me conduisant toujours à des désordres indescriptibles. Depuis l'événement de 2006, début des ricochets, que je mentionne à la fin de mon premier caillou, ma vie a recommencé, tout à fait autrement, et celle que j'étais avant me semble un peu lointaine, si je ne tire pas sur les fils qui dépassent.