Le 14 septembre au soir, je me suis couchée dans le studio que j'occupais, rue des Amidonniers. j'avais une vieille télé noir et blanc et j'ai regardé Apostrophes, l'émission littéraire de Bernard Pivot. Il recevait Jean Rouaud pour "Les champs d'honneur". J'avais lu et beaucoup aimé ce livre.
Le studio était encombré parce que le lendemain je devais faire une fête chez mes amis M. et G. pour fêter mon concours, j'avais invité des tas de gens et j'espérais qu'il ne pleuvrait pas.

J'avais passé une année trépidante, j'avais eu mon concours et j'avais rencontré J-L lors d'un stage pédagogique et entamé une liaison avec lui.
Il vivait à 500 kilomètres, son mariage battait de l'aile et il m'a proposé de venir vivre avec moi.
J'étais à la fois terrifiée et très amoureuse. Je voulais un enfant de lui. Il m'a dit d'accord, banco, on y va.

Mais l'enfant n'est jamais venu et finalement J-L est resté avec sa femme.
Ça m'a rendue triste mais pas autant que je ne le craignais. J'étais un peu soulagée, au fin fond de moi.
J'ai toujours eu peur de lier ma vie à quelqu'un et qu'il la transforme en cauchemar.

Ce 14 septembre, je pensais encore à tout ça à m'endormant.
j'ai entendu le bruit de quelques gouttes contre la vitre et je me suis dit que ce serait trop con que ma fête du lendemain soit gâchée par la pluie.

Le lendemain à 7 heures le téléphone a sonné et ma mère m'a dit qu'il était arrivé quelque chose de terrible.
Mon petit cousin Frank venait de se tuer en voiture.