Pour faire court, en 1996, Jules me quitte aussi brutalement qu'il m'avait voulue toute à lui. Patatras, je retombe le nez dans le ruisseau de mes désillusions.
Mes grands rêves de fondation dynastique prennent l'eau : plus de papa pour mes enfants-pas-nés, mon ventre reste stérile.
Cerise sur le gâteau, j'ai du mal à me relever de l'opération de reconstruction de hanche que j'ai subie en 1995. De nouveaux examens se succèdent et, finalement, à la suite d'une erreur d'interprétation, on diagnostique une maladie grave que je n'ai pas. Mais il me faudra attendre un mois avant d'avoir le démenti. Un mois assez terrifiant.
Pour faire face, je cherche une occupation qui captive mon attention et me permette de rester immobile (je n'ai plus le droit de marcher). De bons amis me conseillent l'achat d'un ordinateur, et viennent me livrer à domicile, dans un carton, celui qui allait devenir mon compagnon, "Gros bestiau". Bien sûr, c'est un pécé (je ne suis pas encore entrée dans l'univers magique d'Apple. Il est gros et plutôt moche, démarre sous DOS et ronfle comme un octogénaire asmathique, mais je l'aime.
J'achète "Windows pour les Nuls", et en avant pour la domestication du bestiau.
Cet ordinateur va me sauver la vie, d'abord je me cantonne au traitement de textes, je fabrique des cartes de visite et autres bricoles, je modifie des photos. J'achète des Cédéroms, je reste baba devant l'Encyclopedia universalis qui tient en une pochette... Je vais d'émerveillements et émerveillements. Peu à peu, ma peine s'use sous les touches de mon clavier, mon écran sèche mes larmes.
A l'été 1996, je retrouve enfin une marche sans boîterie. Même si le haut de ma jambe gauche reste presque insensible (sauf de pénibles décharges électriques), elle a repris une apparence quasi-normale.
Pour mon coeur, c'est une autre histoire, il est tout mâché.
A 35 ans, je me sens comme une femme que la vie aurait rouée de coups mais qui n'a pas dit son dernier mot.
une réaction
1 De gilda - 02/09/2007, 22:08
Malgré mes presque 10 ans de plus, je vais essayer de faire mienne ce qui pourrait dans ta dernière phrase constituer une sorte de devise pour se relever.
Je vois que nous sommes assez nombreuses dans le club des graves diagnostiquées par erreur. C'est quelque chose auquel on fait face sur le moment, puis dont on est heureuses de profiter du soulagement, mais qui sape bien de l'énergie (dans mon cas, à retardement) sans parler de la confiance (en la médecine, globalement).