En 2001, mon Lui et moi décidons de vivre "officiellement" ensemble. On résilie les baux de nos studios respectifs, qui depuis deux ans nous abritent à tout de rôle - quatre mois à deux dans un 6 m2, puis trois mois dans un 20 m2 où l'on grimpe en courant rejoindre l'autre sur la mezzanine juste pour lui souffler un secret, puis retour dans sa niche où l'on se nourrit de clémentines et de rêves ... entassés volontaires, amoureux quotidiens, nous nous émerveillons de toujours nous voir sans jamais nous lasser, sans jamais en avoir assez : je sèche les cours pour rester auprès de lui, on déserte le RU pour les quais en amoureux ; pendant les soirées entre amis, nous sommes les seuls à nous asseoir spontanément l'un à côté de l'autre.

Alors, naturellement, nous cherchons un nid qui serait à nous deux. On le trouve dans le quartier arabe de notre ville. L'appartement est sombre et de guingois, mais la rue est colorée, vivante, prometteuse.

Mes parents se séparent.

Je souffre, je m'isole. Je ne sais pas être heureuse dans la souffrance de mes parents. Je ne sais plus être deux quand ils n'arrivent pas à être un. Je romps, je reviens, il hésite, on ne sait plus, on se frôle, on pleure, on rit quand même.

Il y a cette chose noire qu'on ne sait pas affronter.

Cette tache sur nous deux, depuis trop longtemps.

Mais on s'aime, désespérément. Cest cela : même sans espoir, on continue à ne pas savoir renoncer à ce qu'on vit de beau, de tendre, de doux.

De nouveau, deux appartements pour deux, mais pas un pour chacun.