C'est long, ça n'en finit pas. Je suis coupée en deux, le bas de mon corps est momifié mais ma tête travaille. Ma vie est coupée en deux : je vais et je viens entre la maison et l'hôpital. Deux cents kilomètres d'exil. Je me mets à hurler de plus en plus souvent, le jour, la nuit. Des cris de terreur qui laissent les adultes désemparés. Je hurle et je vomis dès que je monte dans une voiture.

Pour me distraire, ma mère a l'idée de découper des photos dans les magazines qu'elle lit et de les agiter sous mes yeux en me racontant des histoires.

C'est mon premier souvenir : une chambre d'hôpital, des murs verts, ils me semblent très hauts et, se découpant avec netteté sur fond noir, une bouteille d'huile photographiée en gros plan pour quelque publicité, dans une revue.