Année explosion, débordement, inondation, jaillissement, année crue (aux deux sens du terme). Année volcan. Renaissance aussi. Difficile d'en ordonner les mots, la profusion.

365 jours et pas un sans comprimé.

L'horrible constat, un matin au lever, que je ne m'aime pas.

Le gouffre de tout ce qui vacille, et se cogner aux murs de mes insuffisances. Tout me renvoie à moi, miroir soudain cruellement lucide. Je fais l'expérience douloureuse de ma béante fragilité.

Les deuils, deuils de moi, de l'enfance, de l'idéal. Je ne veux pas être une adulte, et celle que je me vois devenir ne me plaît vraiment pas.

Je me livre et me délivre d'un flot de mots enfin mis sur des blessures anciennes. Je découvre en moi mille choses que j'ai toujours sues.

Et mille sages-femmes m'ont aidée à accoucher de moi-même.

Expérience aussi de la transe avec jeûne et veille, sensation d'un regard perçant, extraordinairement perçant sur le monde... et ce qui n'est pas moi.

Jalousie, maladresse, fuite, je blesse autrui et pour finir manque de me blesser moi-même en perdant le contrôle un soir sur une route de campagne... je m'en sortirai indemne mais avec cette conscience aigüe comme un cri que je dois vivre, vivre à tout prix, vivre pour tous ceux que ma mort désarmerait. Cette conscience comme un sursaut contrebalance toutes les autres fois où j'ai pensé, parfois pleuré – chose archifausse – que s'il m'arrivait quelque chose, à personne je ne manquerais. Pensée qui me hantait surtout lorsque je conduisais.

Durant longtemps m'a tenue en éveil, et en vie, l'idée que je ne pouvais pas disparaître avant d'avoir rangé ma chambre : mis de l'ordre dans l'image que je laisserai de moi.

Tout était là : la seule estime qui m'importe était celle des autres, et je m'en croyais/trouvais indigne parce que moi-même je ne m'accordais pas la mienne, tout en me croyant narcissique au dernier degré...

Année insupportable, année où se sont éloignés les prudents et les sages – ou les écorchés vifs, ainsi ce vieil ami qui m'avait toujours dominée, soudain écrasé et nié par la violence de mon besoin d'exister. D'autres s'y sont risqués, et je leur ai fait mal, instable, instable, instable.

Instable humeur un tourbillon certain jour de printemps où ma folie était palpable. J'ai couru partout, virevolté, pour m'abîmer là où le papillon brûle ses ailes, quand il sent la fêlure dans son rire trop aigu.

Je parlais vite, vite, à n'avoir plus de souffle et la salive sèche, et on me disait : Mange ! Bois ! Dors ! Et surtout... Tais-toi !

Tu parles trop, tu parles trop, tu parles trop... tu n'écoutes plus personne et plus personne ne t'écoute... me chantera un jour un malicieux Zorro...

J'ai cherché quel était le plus grand fleuve de la Terre, celui qui avait le plus gros débit. Je l'ai trouvé : fleuve vierge, fleuve large, fleuve immense, aux flots enflés de plus de mille affluents, fleuve qui tourbillonne. C'est l'Amazone.