On m'a déjà demandé des centaines de fois pourquoi je ne porte pas de lentilles de contact, en général, je répond "mais parce que j'aime ça, moi, les lunettes". En fait ça n'a pas toujours été le cas.

Ma première paire de lunettes était rose pale un peu fumé, avec des très gros bords en plastique, de gros verres et une sorte de scotch opaque sur certains cotés des verres pour m'obliger à corriger mon strabisme convergent (si je retrouve des photos, je les mettrais). Autant dire que je les aimais pas beaucoup. Je ne le savait pas encore, mais ma première grosse engeulade allait bientôt arriver.

"Les verres sont super résistants! C'est spécial pour les enfants, il y a un traitement (toussa...)". Le vendeur avait du dire ça devant moi. Sinon je ne vois pas pourquoi mon esprit scientifique, du haut de mes 3 ans, aurait voulu tester la resitance des verres en milieu hostile, c'est à dire : sable et petits cailloux, sur le sol. Voyons la résistance au frottement.

Je suis revenue de la maternelle avec des lunettes complètement opaques, complètement rayées. Ah ben bravo l'esprit scientifique!

1986, ce n'est pas seulement un problème de lunettes rayées, c'est aussi Tchernobyl. L'accident, comme ils disent, quoi. Le seul truc dont je me souviens vraiment, c'est qu'avant cette date, on avait un petit coin de jardin aménagé pour faire pousser quelques légumes et fruits. Bien que le nuage se soit arrété aux frontières de la France, mes parents ont pris la sage decision de ne plus rien y faire pousser et de détruire ce petit coin. Après tout, Metz, c'est pas très loin de la frontière.

Je me souviens vraiment de ça, mais aussi d'un autre petit truc : le regard inquiet des gens qui regardaient la télé à cette époque. Parents, grands parents, amis de la famille, dès que quelqu'un prononcait le nom de cette ville, ça plombait l'ambiance, immanquablement.