J’ai 40 ans, et comme d’autres, je me sens plus « fille » que « femme ». Et pourtant. Cet anniversaire-là me fauche violemment. Je ne l’aurais jamais imaginé. Je m’en foutais de mes anniversaires, jusque là. Cette dizaine nouvelle me gifle symboliquement : 40 ans. Seule. Pas d’enfant.

Inutile. Sèche et stérile. J’ai vu défiler dans ma tête folle ces mois-là tous les monstres que j’avais refoulés les années d’avant. J’avais encaissé sans presque broncher la mort des uns et des autres, la dérive professionnelle et sentimentale, en désordre et en parant au plus urgent. Je me prends tout dans la gueule pour une lamentable petite porte ouverte sur la mélancolie d’avoir cet âge réputé difficile pour une femme. Merde, mes copines commencent à se ménopauser, c’est quand mon tour ?! C’est quand « trop tard » ?!

Je fais le vide autour de moi (lapsus d’écriture qui « m’amuse » toujours : j’ai tapé « vie » au lieu de « vide », spontanément…). J’avais toujours dit que ma vie professionnelle était un fiasco, ma vie sentimentale itou, toute de destruction et de larmes, mais que j’avais au moins réussi quelques belles histoires d’amitié… Cette année-là, j’inverse la vapeur : J’obtiens LE job dont je rêve depuis toujours, après des mois de quasi-harcèlement auprès des responsables de la boite en question. Je ne lâche pas l’affaire et ça paie. En même temps, je rencontre Fox, nous nous installons ensemble très vite, c’est harmonieux et gai, ça durera un an. Une jolie histoire qui me permettra de tenir… peut-être.

Parce que cette année-là, j’envoie au plus loin de moi mes plus belles amitiés. Mes deux amis-frères de plus de 20 ans que je soupçonne incapables de comprendre mon désarroi insondable. C’est leur faire injure, sûrement. C’est irréparable, peut-être. Au moment où je les ai balayés je n’ai pas mesuré les conséquences, je n’ai pas su faire autrement…Coup de lune. Câble sectionné dans mes sentiments les plus profonds. Je ne sais pas. 3 ans après, j’en paie encore le prix, eux aussi. J’essaie de mettre un baume maladroit sur deux amputations, deux arrachages. Pourquoi je l’ai fait, je ne sais toujours pas. Je sortais du fond d’un trou où personne n’avait pu m’accompagner, même pas eux, mes frères, mes semblables. De ce trou-là est ressorti une presque-inconnue pour moi-même, violente et amère, crachant du feu et de la lave autour d’elle.

Il y a toujours une raison… J’espère que je la trouverai un jour.