Pourquoi cette démarche ? Pourquoi cette envie furieuse de rebondir moi aussi, quand j'ai lu les ricochets de Kozlika ? Est-ce par intérêt sincère pour l'idée de faire rebrousser chemin à ma vie, ou de la faire au contraire aller de l'avant depuis le tout début (j'ai longtemps hésité entre les deux cheminements, refusant cependant de les emprunter tous les deux pour les faire se croiser à mi-chemin à l'année de ma puberté), ou par simple envie de mettre moi aussi ma propre vie en jolis mots ?

Mes textes sont (et seront) très personnels, autant pour leur aspect biographique que pour l'investissement littéraire que représentent ces mots pêchés dans le meilleur de mes procédés littéraires. Pourtant, s'ils sont tellement « moi », puisque c'est de moi racontée (et embellie) par moi qu'il s'agit, de mes mots et mes phrases sur les passages de ma vie que j'ai choisi, moi, de raconter, ils sont loin de me livrer toute entière, puisqu'ils sont tellement réducteurs, puisqu'ils dépendent de souvenir incertains, des leçons que j'en ai tiré, de la façon dont je tiens à les présenter - mais, « même si ce n'est pas vrai, il faut croire à l'histoire ancienne » [1].

Il n'est pas anodin par ailleurs de conduire ce parcours sur Petits cailloux et ricochets, de ne pas être seule dans l'aventure ; parce que l'élan en a été donné par l'émouvante lecture de la remontée de Kozlika, parce que d'autres se sont lancés dans l'exercice, parce que cet espace justifie à lui seul mes intro-rétrospectives. Mes petits cailloux sont avant tout destinés à être écrits par moi plutôt que lus par d'autre, une raison de plus de les noyer dans une mosaïque de morceaux de vie plutôt que de les faire apparaître en exergue sur un carnet où ils seraient trop décalés avec l'esprit du lieu ; en marge de ma production littéraire écrite habituelle, ils ne sont d'ailleurs pas annoncés sur American Rhapsody, lieu de mes épanchements quasi quotidiens sur ma vie de thésarde atterrie en Californie, sans pour autant que je ne me cache d'être l'auteur des deux.

Bien que mon plaisir principal soit dans la rédaction de ces textes, pour moi, pour voir par mes propres yeux d'insécure [2] chronique ce que je suis fière d'avoir traversé, accompli, surmonté, j'attends avec impatience de voir se mêler les récits de tous les auteurs du projet ; de voir s'ils résonnent entre eux, s'ils coïncident parfois par année, par âges ou par hasard...

Notes

[1] Léo Ferré - La vie d'artiste

[2] j'emprunte avec joie ce mot aux Québécois